Les priorités du gouvernement

 

écoliersLe budget témoigne des priorités du gouvernement

De 2,2 % en 1961, la part du budget de l’État consacrée à l’éducation était de 1 % en 1995 et 4 % en 2003. A partir de 1990, les dépenses concernèrent pour l’essentiel des constructions d’universités éloignées des centre-villes, limitant toute  contestation.

Dans le primaire, environ 85 % des enfants étaient inscrits à l’école, mais le certificat de naissance devint obligatoire pour l’inscription, excluant certains enfants. Les parents durent payer des frais secondaires (uniformes, cahiers et crayons) auparavant pris en charge par le gouvernement. La seule méthode pédagogique autorisée était la répétition. Alors que les enseignants démissionnaient, le nombre des étudiants augmenta poussant le gouvernement à organiser en 1992 l’université à distance. Les étudiants recevaient le sujet d’examen à l’inscription étaient quasi assurés de réussir les examens et le gouvernement évitait tout contact entre les étudiants.

Malgré une augmentation en 2006, le salaire d’un instituteur, 35 000 Kyats (35 € environ) était insuffisant du fait de l’inflation importante. En 2013, tous les fonctionnaires eurent leur salaire augmenté d’une prime de 30 000 Kyats, soit environ 80 € pour  un instituteur. Ils continuent pourtant à organiser des cours payants après les cours.

En 2020, si une éducation de qualité, accessible à tous, est composante de la justice sociale, ce n’est pas encore le cas en Birmanie. Les Tuishen, cours de l’après-midi, payant, au cours desquels est dispensé l’essentiel de l’enseignement, sont toujours en vigueur. Ils coûtent par exemple 1 900 Ks par mois à Mynkaba, soit près de 2 $ dont une partie va à l’enseignant et une partie au gouvernement !L’éducation n’est pas une  priorité du gouvernement. Le programme ultra nationaliste mis en place en 1962 est toujours là. 

Et la santé ?

En 2007, l’État avait dépensé 376 Kyats, soit 0,37 € pour la santé et par habitant et le manque de moyens n’était pas compensé par l’aide internationale du fait des sanctions internationales.

Plus du tiers de la population, dans les régions frontalières, n’a accès qu’aux soins de santé primaire (Myanmar Data, 2009). Si, selon les statistiques du gouvernement de 2009, la mort périnatale, baissa entre 1990 et 2008 de 45 à 20 pour 100 000, les maladies infectieuses intestinales de 40,8 à 17,8 pour 100 000, les décès par tuberculose augmentèrent, passant de 32,6 à 51,8, ceux par cancer sont passés de 34 à 57, par malaria de 20 à 26,3 pour 100 000.

Selon Médecins sans frontières,  240 000 personnes étaient infectées par le VIH (B. ROGERS, 2012). Bien qu’elle ne soit pas mentionnée dans les statistiques, la lèpre est encore présente dans le pays.

Et l’armée ?

Depuis l’indépendance du pays pour certains, les groupes ethniques revendiquent des droits et sont entrés en rebellion contre le gouvernement birman. Certains ont signé des accords, souvent contre le droit de poursuivre certains trafics ou commerces, le droit de garder les armes ou une armée. La junte développa l’armée dans les années 90, qui passa à environ 400 000 hommes. L’armée élargit ses capacités  économiques  dans les secteurs agricoles, les banques et l’industrie et les soldats se mirent à prélever là où ils se trouvaient, ce dont ils avaient besoin.Depuis le coup d’état du 1er février 2021, les combats ont repris dans tout le pays.

En 1990, les dépenses militaires de l’État représentaient 222 fois celles de la santé et de l’éducation réunies. En 2008, les dépenses militaires de l’État représentaient 25 % du budget de l’État, selon les chiffres du gouvernement.

Mais ces chiffres ne rendent pas totalement compte de la réalité : une grande part des dépenses d’armement n’apparait pas dans le budget, d’autre part, de nombreux bataillons de l’armée ne disposant pas de budget suffisant pour leur entretien, compensaient par des prélèvements sur la population. Il faut aussi intégrer le budget des armées des groupes ethniques pour avoir une idée globale des sommes dépensées  et non consacrées au développement ; elles font payer un impôt de guerre à chaque maison de la zone, et les  familles devaient aussi envoyer un membre de la famille dans l’armée (Interviews dans l’État Shan et l’État Kachin, 2010 / 2011).

Après les élections, la censure s'assouplit

© C. Dutilleul

Jusqu’à 2012, la censure était omniprésente. Communiquer avec des médias étrangers sur la politique, était passible de prison, et le contenu des journaux se limitait aux faits et gestes des militaires. Selon Reporters sans frontières, un magazine privé était, en moyenne, censuré du tiers de son contenu en 2011.

Il était interdit d’écouter les radios étrangères. Posséder une radio, une télévision ou un fax, un ordinateur ou un téléphone est soumis à autorisation et paiement d’une licence. Selon les statistiques du gouvernement, en 2009, 144 355 personnes disposaient d’une télévision et 78 554 d’un magnétoscope et en 2006 70 000 disposaient d’une antenne parabolique.

Les journaux Birmans  étaient ceux du gouvernement : Myanmar Ahlin, New light of Myanmar ; ceux, privés faisaient l’objet d’une stricte censure : The Mirror, et Myanmar Times…. The Voice a été sanctionné de 2 semaines de suspension pour avoir publié un article sur la constitution. The Voice et 7 days ont été interdits de publication pour avoir mis en première page une photo de Aung San Suu Kyi le jour de sa libération en novembre 2010 … D’autres médias émettaient de l’étranger, non soumis à la censure : Democratic Voice of Burma, The Irrawaddy, Yangon globe.

Un tournant se produisit lors de la manifestation des moines du 22 septembre 2007 : pour la première fois, les téléphones portables furent utilisés. Les films étaient passés en Thaïlande, puis diffusés par internet (Ostergaard, A., Burma VJ, Reporting from a closed country, IDFA / Cinema Delicatessen, 2009). Depuis les élections de 2010 et la transmission du pouvoir à un gouvernement civil, la censure s’est considérablement assouplie et les critiques fréquentes dans les journaux.

Combien sont-ils, les Birmans qui ont quitté leur pays ?

On parle de 2 à 4 millions en Thaïlande. La pression politique, les conflits ethniques ou le besoin d’un revenu poussent les Birmans à partir. 

En 2010, 37e rue, de nombreuses agences de recrutement organisaient le départ les jeunes. L’élite du pays, comme les pauvres sont partis avec la bénédiction du gouvernement…

2008 …C’est d’abord une femme que je rencontre. Elle est fière de m’annoncer le départ de son fils le lendemain, en Malaisie. Il est passé par une agence où elle a déboursé 100 000 Kyats, soit environ quatre-vingt dollars, pour un passeport et un contrat de travail ; une fois sur place, l’agence gardera les sept premiers mois de salaire. S’il tombe malade, il sera renvoyé.

…Puis, c’est un jeune homme à la maison de thé. Il me montre  l’annonce de Greenway, office du gouvernement ; lui est chimiste et contre 50 000 Kyats, l’agence Greenway lui fournira une lettre de recommandation et un contrat. Il devra payer le passeport, le voyage… Son contrat de chimiste lui garantit 1200 dollars par mois.

Depuis le coup d’état de 2021, l’exode touche toute la population. Beaucoup partent en Thaïlande.

The budget reflects the priorities of the government

From 2.2% in 1961, the share of the state budget devoted to education was 1% in 1995 and 4% in 2003. From 1990 onwards, most of the expenditure was on building universities far from the city centre,  limiting any contestation.

In primary education, about 85% of children were enrolled in school, but the birth certificate became obligatory for registration, excluding some children. Parents had to pay secondary fees (uniforms, notebooks and pencils) previously covered by the government. The only pedagogical method allowed was repetition. As teachers resigned, the number of students increased, the government organized the remote university in 1992. Students received the exam subject, were almost guaranteed to pass the exams and the government avoided any contact between students. Despite an increase in 2006, the teacher’s salary, 35,000 Kyats (about 35 €) was insufficient due to high inflation. In 2013, all civil servants had their salary increased by a bonus of 30,000 Kyats, (about 80 €).

In 2020, while quality education, accessible to all, is a component of social justice, this is not yet the case in Burma. The Tuishen, a paying afternoon course, during which most of the teaching is taught, are still in use. For example, they cost in Mynkaba 1,900 Ks per month, or nearly $2, a portion of which goes to the teacher and another to the government! The ultra-nationalist program set up in 1962 is still there.

What about health?

In 2007, the State had spent 376 Kyats, or €0.37 for health and per capita and the lack of means was not compensated by international aid.

More than a third of the population in border regions have only access  to primary health care (Myanmar Data, 2009). Although, according to government statistics in 2009, perinatal death fell between 1990 and 2008 from 45 to 20 per 100,000, intestinal infectious diseases from 40.8 to 17.8 per 100,000, tuberculosis deaths increased from 32.6 to 51.According to Doctors Without Borders, 240,000 people were infected with HIV (B. ROGERS, 2012). Although not mentioned in the statistics, leprosy is still present in the country.

And the army?
Since the country’s independence for some, ethnic groups have been demanding rights and have gone into rebellion against the Burmese government. Some have signed agreements, often against the right to prosecute certain traffics or businesses, the right to keep arms or an army. The junta developed the army in the 1990s to about 400,000 men. The army expanded its economic capacity in agricultural sectors, banks and industry, and soldiers began to take what they needed from where they were.

Since the February 1, 2021coup d’état, fighting has resumed across the country.

In 1990, Government military spending was 222 times higher than health and education. In 2008, the government’s military spending represented 25% of the state budget, according to government figures. But these figures do not fully reflect the reality: a large part of the expenditure on armaments does not appear in the budget, on the other hand, many battalions of the army not having sufficient budget for their maintenance, offset by withdrawals from the population. It is also necessary to integrate the budget of the armies of ethnic groups in order to have an overall idea of the sums spent and not devoted to development.

They charge a war tax to each house in the area, and families were also required to send a family member into the army (Interviews in Shan State and Kachin State, 2010/2011).

Untill 2012, censorship was everywhere.
Communicating with foreign media about politics was punishable by imprisonment, and the content of newspapers was limited to the actions of the military. According to Reporters Without Borders, a private magazine was, on average, censored by a third of its content in 2011. Owning a radio, television or fax, computer or telephone is subject to licensing and payment. According to government statistics, in 2009, 144,355 people had a TV and 78,554 had a VCR and in 2006, 70,000 had a satellite dish.Burmese newspapers were those of the government: Myanmar Ahlin, New light of Myanmar; The Mirror, and Myanmar Times…. The Voice was fined two weeks for publishing an article on the constitution. The Voice and 7 days have been banned from publication for putting on the front page a photo of Aung San Suu Kyi on the day of her release in November 2010 … Other media were broadcasting from abroad, not subject to censorship: Democratic Voice of Burma, The Irrawaddy, Yangon globe.A turning point occurred during the demonstration of the monks on September 22, 2007: for the first time, mobile phones were used. The films were screened in Thailand and then broadcast over the internet (Ostergaard, A., Burma VJ, Reporting from a closed country, IDFA/ Cinema Delicatessen, 2009). Since the 2010 elections and the transfer of power to a civilian government, censorship has eased considerably and criticism has been frequent in newspapers.